UNESCO Green Citizens : quand les citoyens sur le terrain inventent un monde meilleur

Face aux enjeux climatiques, l’UNESCO valorise des initiatives citoyennes innovantes aux quatre coins du globe. Sa directrice nous explique comment ce programme tisse un réseau d’acteurs engagés et prouve que des solutions concrètes existent déjà.

 

Entrepreneurs d’avenir : Pouvez-vous nous présenter l’initiative UNESCO Green Citizens ? Quels sont ses objectifs principaux et sa vision à long terme ?

Armelle Arrou : Notre initiative UNESCO Green Citizens représente une passerelle entre l’expertise scientifique de l’UNESCO, les solutions citoyennes locales et l’énergie des jeunes déterminés à agir face au changement climatique. Nous partons d’un constat simple mais puissant : partout dans le monde, des citoyens ordinaires développent des solutions remarquables pour protéger l’environnement. Ces innovations méritent d’être connues et partagées. C’est précisément notre mission.

Notre objectif principal est de valoriser ces innovations citoyennes tout en mettant en lumière l’expertise scientifique de l’UNESCO. Les experts scientifiques de l’UNESCO identifient des enjeux liés au changement climatique et à la protection de l’environnement, et grâce à l’initiative UNESCO Green Citizens, nous montrons que des solutions concrètes développées par des citoyens existent déjà sur le terrain. Ces solutions méritent d’être reconnues. À long terme, notre vision est de tisser un réseau mondial de citoyens engagés, en collaboration avec les experts scientifiques, pour échanger leurs connaissances et expériences et inspirer l’action à plus grande échelle.

Ce qui me touche particulièrement, c’est de voir comment ces initiatives citoyennes créent un mouvement d’espoir. Face aux nouvelles souvent décourageantes sur l’état de notre planète, UNESCO Green Citizens apporte la preuve que des solutions existent, qu’elles fonctionnent et qu’elles peuvent être multipliées.

 

Quels types d’initiatives soutenez-vous à travers UNESCO Green Citizens et comment sélectionnez-vous les projets ou les porteurs d’initiatives ?

Chez UNESCO Green Citizens, nous nous concentrons sur des initiatives qui s’inscrivent dans les cinq domaines d’expertise de l’UNESCO : la biodiversité, l’éducation au développement durable, l’hydrologie, les savoirs locaux et autochtones, et l’océan.

Notre processus de sélection est rigoureux. Nos équipes identifient d’abord les projets. Ensuite, des experts de l’UNESCO les évaluent selon trois critères essentiels : l’innovation, l’impact local concret et le potentiel de réplication dans d’autres contextes.

Cette dernière dimension est particulièrement importante. Nous ne cherchons pas seulement à célébrer des réussites isolées, mais à identifier des modèles qui pourraient être adaptés ailleurs.

Notre soutien va au-delà d’une simple reconnaissance : nous offrons à ces projets une visibilité internationale et nous facilitons les échanges entre porteurs de projets.

 

Pourriez-vous partager un ou deux exemples de projets particulièrement inspirants soutenus par UNESCO Green Citizens, et l’impact qu’ils ont eu ?

Parmi les nombreuses initiatives que nous soutenons, deux exemples illustrent particulièrement la puissance de l’action citoyenne.

Le premier est Bye Bye Plastic Bags, porté par Melati et Isabel Wijsen, deux sœurs qui ont lancé ce mouvement à 12 et 10 ans à Bali. Confrontées au spectacle des plages paradisiaques souillées par les déchets plastiques, elles ont décidé d’agir en lançant une campagne pour l’interdiction des sacs plastiques à usage unique. Leur persévérance a porté ses fruits : en 2019, le gouverneur de Bali a signé un décret interdisant le plastique à usage unique.

Ce qui me fascine, c’est de voir comment deux jeunes ont transformé leur indignation en action concrète, puis en changement législatif. Elles ont prouvé que la jeunesse n’est pas seulement l’avenir de notre planète, mais bien son présent. Aujourd’hui, leur mouvement s’est étendu à d’autres régions d’Indonésie et inspire des jeunes du monde entier.

Le second exemple est Aqualuz, développé par la jeune scientifique brésilienne Anna Luisa Beserra. Elle a conçu un système ingénieux de purification d’eau de pluie grâce au rayonnement solaire. Dans de nombreuses régions rurales du Brésil, particulièrement dans le Nordeste semi-aride, l’accès à l’eau potable reste un défi majeur. Le système Aqualuz apporte une solution adaptée : sans produits chimiques, sans filtres complexes et à un coût accessible pour les familles avec peu de revenus.

L’impact est considérable : des milliers de personnes ont désormais accès à une eau saine et le temps auparavant consacré à la collecte d’eau peut maintenant être dédié à l’éducation ou à des activités génératrices de revenus.

Ces deux exemples montrent comment des solutions locales innovantes peuvent répondre à des défis environnementaux majeurs tout en améliorant concrètement les conditions de vie des communautés. Ils prouvent que l’innovation peut venir de partout et que la motivation à créer un impact positif est souvent le moteur le plus puissant.

 

L’UNESCO a identifié plus de 150 initiatives innovantes et locales à travers 65 pays. Qu’est-ce que cela révèle, selon vous, sur la capacité des citoyens à innover face aux défis environnementaux ? Et comment ces initiatives locales peuvent-elles inspirer des actions à plus grande échelle ?

Cette diversité de 150 initiatives à travers 65 pays me remplit d’espoir et confirme que l’innovation environnementale jaillit partout.  Cette capacité d’innovation citoyenne remet en question l’idée que les solutions aux défis environnementaux nécessitent forcément des technologies sophistiquées ou des investissements colossaux. Souvent, c’est la connaissance intime d’un territoire, combinée à l’urgence de résoudre un problème concret, qui mène aux innovations les plus pertinentes.

Je suis également frappée par la résilience de ces initiatives. Malgré les obstacles, qu’ils soient financiers, réglementaires ou culturels, ces citoyens engagés trouvent des moyens de faire avancer leurs projets. Cette détermination est une source d’inspiration pour nous tous.

Quant à leur potentiel pour inspirer des actions à plus grande échelle, il est immense. D’abord, ces initiatives servent de modèles reproductibles. Une technique innovante de reboisement développée dans un village peut être adaptée dans des centaines d’autres contextes similaires. C’est cette capacité d’essaimage que nous cherchons à encourager.

Ces projets démontrent que des solutions efficaces existent déjà. Pour les décideurs politiques ou les grandes organisations, ils constituent des preuves concrètes. Ils peuvent ainsi inspirer des politiques publiques plus ambitieuses ou orienter les investissements vers des solutions éprouvées sur le terrain.

Enfin, ces initiatives jouent un rôle crucial dans le changement des mentalités. En montrant que des citoyens ordinaires peuvent avoir un impact significatif, elles encouragent d’autres à s’engager. Elles créent un mouvement qui s’amplifie à mesure que les expériences réussies se font connaître.

Notre rôle est d’amplifier cette dynamique en connectant ces initiatives entre elles, en documentant leurs méthodes et leurs résultats, et en leur donnant une visibilité internationale. Nous sommes convaincus que c’est dans ce foisonnement d’innovations locales que résident de nombreuses clés pour relever les défis environnementaux mondiaux.

 

L’UNESCO a accueilli les 20 ans de l’Université de la terre les 14 & 15 mars derniers. Quelle est la résonance de vos valeurs avec le thème central de cette édition anniversaire de l’événement, « Nature = Futur » ?

Le thème “Nature = Futur” de l’Université de la terre résonne profondément avec notre mission chez UNESCO Green Citizens. Nous ne concevons pas la nature comme un simple décor, mais comme le fondement même de notre avenir.

Depuis le début de cette initiative nous souhaitons soutenir des citoyens qui inventent de nouvelles façons d’habiter la Terre en cohérence avec la nature. Dans chaque domaine où l’UNESCO s’engage : biodiversité, éducation au développement durable, hydrologie, savoirs autochtones, et océan, nous voyons des citoyens ordinaires réaliser l’extraordinaire. Ce qui me touche particulièrement, c’est de voir comment ces projets locaux apportent des réponses concrètes aux grands défis identifiés par nos scientifiques. Ils nous prouvent chaque jour que les solutions existent déjà.

Nous sommes profondément convaincus que transformer notre relation avec les écosystèmes vivants ne peut se faire qu’en tissant des liens entre tous les acteurs engagés. C’est pourquoi nous créons ce réseau global de citoyens engagés – certains rejoignent des projets existants, d’autres voyagent à la rencontre de ces initiatives.

 

“Nature = Futur” n’est pas qu’un slogan pour nous, c’est une évidence quotidienne que nous voyons se concrétiser dans chaque initiative que nous soutenons.

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