L’entreprise contributive, concilier monde des affaires et limites planétaires

Une entreprise qui se synchronise au vivant en prenant en compte les enjeux sur le long terme, un manuel pour celles et ceux qui se décident à agir en souhaitant adopter une activité éco-responsable, ce livre s’adresse ainsi à tous les niveaux d’une organisation et joue le rôle d’une véritable boussole pour les entreprises de demain.

 

Entrepreneurs d’avenir : Vous venez de publier un livre sur l’entreprise contributive. Concilier le monde des affaires avec les limites des planétaires n’est-il pas un oxymore ?

Céline Puff Ardichvili et Fabrice Bonnifet : Il serait souhaitable pour nous tous que ces deux idées finissent par se conjuguer. Le plus tôt sera le mieux… Il n’y aura pas de “grand soir” de la prise de conscience générale : l’attendre c’est se condamner à l’inaction. En revanche, il est possible de semer des graines d’enthousiasme qui pourront se propager : notre livre est un guide pour les « semeurs » ! Il rappelle rapidement pourquoi il faut agir, en insistant sur les ordres de grandeur : tout le monde ou presque sait qu’il y a un problème dans notre modèle de développement, mais peu de gens comprennent et mesurent sa gravité réelle. Les enjeux sont de taille mais la prise de conscience ne doit pas nous bloquer au contraire. C’est pourquoi, après un rapide passage sur le « pourquoi » agir, le livre se concentre sur le « comment », en présentant un corpus de méthodes pour passer à l’acte, à l’échelle des enjeux – et pas en surface. Et pour cela, nous nous appuyons sur le retour d’expérience des pionniers de la création d’une valeur plus durable. Pour rendre soutenable notre économie, il ne faut pas simplement espérer remplacer les énergies fossiles par des énergies renouvelables, il va être nécessaire de promouvoir et rendre désirable un autre modèle de société, et ce modèle sera basé sur de l’abondance frugale ! Et ce n’est pas en nous entêtant dans le système économique tel que nous le connaissons que nous allons réussir…

 

N’est-ce pas naïf de penser que le capitalisme puisse disparaître ?

Ce qui est naïf c’est de penser qu’il puisse continuer d’exister dans sa forme actuelle ! Les ressources naturelles sont tellement exploitées et les écosystèmes sont tellement altérés, à commencer par le climat, que nous sommes désormais sur le toboggan de l’effondrement… Il nous reste juste la possibilité de ralentir la descente. Le business n’est rien d’autre que la capacité à utiliser des ressources naturelles en les transformant via des machines alimentées par de l’énergie, le tout financé par de l’argent qui n’est qu’une commodité humaine – et qui ne sera d’aucune utilité sur une planète devenue étuve. Quand bien même nous découvrions un jour une source d’énergie infinie, se poserait rapidement le sujet de la pérennité des ressources. Et même si l’on faisait durer les ressources en les exploitant toujours plus loin ou plus profond, se poserait alors le problème de la viabilité de la Terre. C’est inextricable ! Donc ce qu’il faut changer, ce sont nos modèles économiques. C’est pour cela que l’idée même d’une croissance verte qui resterait sur le même paradigme que celle que nous connaissons – le capitalisme couplé à la financiarisation débridée de l’économie – est une hérésie mathématique. La libre concurrence pure et parfaite ne peut fonctionner que si les coûts de préservation du capital naturel et humain sont intégrés dans la comptabilité.

 

En quoi le concept d’entreprise contributive peut-il être utile aux entrepreneurs d’avenir ?

C’est une boussole par temps de brume. Nous sommes entrés dans un monde chaotique et incertain, à la convergence des pics : des émissions de CO2, des dettes financières, de l’érosion de la biodiversité, de la démographie, de l’exploitation des ressources et des sols, des inégalités sociales…. Penser que nous pourrons continuer notre numéro de funambule en refusant d’écouter les signaux forts de nos écosystèmes qui se délitent est irresponsable. L’entreprise contributive, en intégrant les faits scientifiques dans sa raison d’être, se resynchronise au vivant, c’est-à-dire à l’essentiel. Les entrepreneurs d’avenir sont les entrepreneurs qui sauront faire pivoter les modèles. Les qualités qui les animeront seront la lucidité, l’humilité et le courage. Ils vont devoir travailler autrement pour concevoir des modèles d’affaires inspirés de la nature, et apprendre à collaborer avec leurs parties prenantes pour trouver des solutions qui ne produisent pas d’externalités négatives. L’entreprise contributive n’est pas une option, car il n’y a pas de planète B.

 

L’entreprise contributive

 

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